mercredi 18 mars 2015

Les Français, réaction sur la miss japon métisse : ont-ils le droit de s'offusquer ?

Trois jours avant l'éclipse solaire, l'influence de l'alignement des planètes semble faire s'exciter les esprits sur des sujets sur lesquels ils ne devraient pas. Le 17 mars 2015, le Japon est chamboulé par sa première miss métisse, alors qu'en France on aime plutôt ça "l'exotisme", trop peut-être.

L'émoi des Japonais sur leur nouvelle miss réside dans le fait qu'elle soit "half" (à moitié), sous entendu "pas une vraie japonaise". Ariana Miyamoto est japonaise et afro-américaine, un mélange qui reste tout de même rare dans l'ensemble de l'Asie. Mettons de côté les insinuations racistes et considérons un argument plus objectif : ce n'est pas sa beauté (évidente) qui est reniée mais le fait que certains japonais considèrent que son physique est trop différent des japonaises pour pouvoir représenter le Japon. Il est vrai que les commentaires repris par Libé la désignent comme "différente des fragiles Japonaises" ou ayant des "dents bien alignées" et des "grandes jambes". De mon expérience au Japon, j'avais déjà pu observer que, premièrement, les japonaises avaient ce qu'on appellent un "sourire anglais" (pas celui de David Beckham mais plutôt celui d'Austin Power) et que, deuxièmement, elles semblent être complexées par leur morphologie (selon elles, un long tronc et des jambes courtes). Certains commentaires d'internautes vus sur Yahoo qualifient même la nouvelle miss de "plus belle qu'une japonaise aux yeux bridés", "ravissante contrairement aux asiatiques qui se ressemblent toutes, au teint blanc, aux yeux et à la bouche quasi-inexistants"...

Ainsi, ce que l'on constate c'est que sa beauté réside précisément dans des critères anatomiques qui ne représentent PAS les japonaises. On s'aperçoit aussi malheureusement que les bons français (de toutes origines confondues) se donnent le droit de juger les goûts en matière de beauté d'une autre culture, tout en y insultant les femmes. Cela montre d'une part une ignorance de l'esthétique du Japon et d'autre part un réel dédain envers les asiatiques.

Ariana Miyamoto miss Japon
Japonaise et afro-américaine. Une beauté qu'on retrouverait plutôt aux USA.

Bien que très jolie, Miyamoto avoue elle-même ne pas se ressembler à une japonaise mais se sentir bel et bien comme telle (elle est née et à vécu jusqu'à son bac au Japon, et a étudié la calligraphie). Avouons-le aussi, malgré son statut de miss Japon, on dirait à peine une asiatique, même vêtue d'un joli kimono elle paraît "déguisée". Ce n'est non plus pas la première fois qu'un sentiment de rejet se dégage de la population japonaise envers L’ÉLUE, en effet une "vraie" japonaise", Riyo Mori, Miss Japon 2007 et pourtant également élue Miss Universe n'avait pas fait l'unanimité. Jugée trop occidentalisée par ses pairs (elle a quitté le Japon à l'age de 16 ans), elle ne représentait pas les canons de beauté nippons.

Photo1
Riyo Mori sur son site officiel

L'Occident et l'Extrême-orient ont des idéaux de beauté différents. Au Japon, on fait la différence entre vêtements de tradition japonaise et vêtements occidentaux : wafuku (和服) versus youfuku (洋服). L'un est désigné par l'idéogramme de l'harmonie tandis que l'autre simplement par celui de l'Occident. Et c'est valable aussi pour la cuisine (washoku vs youshoku), le papier (washi), le style de pièce d'une maison etc. Les Japonais ont donc une idée précise de ce qui est nippon ou pas. Par conséquent, ne nous offusquons pas lorsqu'ils pensent que dans leur miss ne se retrouve pas l'image de leur identité nationale. En revanche, lorsqu'en France, on les taxe d'avoir mauvais goût, ce n'est pas légitime.  On ne peut pas croire que nos goûts sont indiscutables, les projeter à l'autre bout du monde et espérer une adhésion... Rappelons-nous que selon les siècles, les œuvres artistiques occidentales suivaient mêmement une règle esthétique stricte appelée le Nombre d'or et qu'on jugeait de la beauté des femmes par des canons de proportion tout aussi stricts.

En France, il est plus politiquement correct de vénérer le métissage, par démagogie ou par complaisance ? Est-il plus facile d'être considérée comme une beauté métissée car les critères sont moins exigeants grâce à la seule évocation exotique ? Quoiqu'il en soit, le pays a une obligation d'acceptation de métissage de par son histoire coloniale importante avec l'Afrique, il est normal d'intégrer leur population dans le "patrimoine français". Mais, alors, qu'en est-il de l'Indochine ? On s'offusque que les Japonais n'aiment pas leur miss métisse mais aucun visage asiatique féminin n'apparaît nulle part parmi les miss régionales, ni chez les actrices ou même les chanteuses ...

lundi 12 mai 2014

L'avortement d'Emily Letts, un buzz malsain ?

Une américaine filme son avortement et le met en ligne (lien francetvinfo). Il s'agit d'une jeune femme de 25 ans qui ne se sentait pas prête pour être mère. On ne sait rien d'Emily Letts, sauf qu'elle travaille dans la clinique d'avortement où elle a effectué le sien. Je ne pense pas que le débat sur l'avortement doit encore avoir lieu : une femme dispose de son corps, ce n'est pas une machine à faire des humains. L'avortement, j'y avais déjà réfléchi, c'est un sujet classique de débat qu'on donne aux étudiants de première année au même titre que l'homosexualité et l'eugénisme (et avec à l'époque, le téléchargement illégal). Mais quand on a 19 ans, qu'on se s'est pas faite violée ou qu'on n'a pas fait d'orgie sans protection (j'ai eu une vie trépidante), il était plus difficile de ressentir le sujet.

Mais à mon âge et à notre époque, le sujet semble plus accessible voire "banalisé". Ce n'est plus une extrême humiliation ou un crime contre l'humanité, je crois... D'ailleurs, Emily justifie sa démarche comme ayant le but de déculpabiliser les femmes qui y ont recours, surtout les plus croyantes. Durant son intervention on ne voit que son visage, elle paraît détendue et sourit même, à tel point que certaines l'ont accusée sur Twitter, de vouloir transformer cet événement personnel en quelque chose de cool. D'autres font simplement remarquer que l'avortement n'est pas toujours aussi facile et que la grossesse est aussi interrompue pour raisons médicales (risque pour la mère, malformations) et ne se réduit pas qu'à une décision prise parce qu'on ne voulait pas être parent. L'avortement se pose dans nos sociétés occidentales, comme une solution aux problèmes de viols ou de grossesse chez les adolescentes, comme un moyen de "contraception" quand il est trop tard. Toutefois atténuer la gravité de l'avortement c'est d'une part accepter la sexualité de la femme mais d'autre part admettre qu'on a encore des relations sexuelles non protégées ou sans contraception.

Concernant l'avortement de Letts, qu'elle ait pris cette décision ne regarde qu'elle, on ne connait pas les détails de son histoire mais par contre elle a bien pris soin de partager ce qui aurait dû rester du domaine de l'intime car cela concerne tout de même sa matrice (pour rester polie). Le sujet de la vidéo ce n'est finalement pas l'avortement mais elle-même, puisqu'on ne voit que son visage. Elle affirme qu'il n'y a pas de but politique, elle poste même sa vidéo sur son Facebook, le plus voyeur des réseaux sociaux. On peut en déduire que sa démarche tient du spectacle exposé d'une façon simpliste. Le problème réside dans le traitement de cette IVG, c'est une décision personnelle qui a des conséquences sur le reste de sa vie et un acte médical intime présentés d'une façon triviale et réduits à son simple visage souriant : ça ne lui fait rien. Il s'agit quand même d'une vie, pas un être humain légalement mais pas un œuf de poule non plus. Est-ce que l'émancipation des femmes qui les ont masculinisées ne les auraient pas aussi rendues indifférentes à leur propre biologie ?

C'est une histoire qui date de 2 mois et on continue d'en parler car au fond, la population est aussi friande de ce genre d'histoire sensationnaliste. Telle la métaphore de la grange de Don DeLillo dans White Noise, c'est le fait qu'il y ait des spectateurs qui créent l'événement, c'est l'idée qu'ils se font sur le principe de la démarche de Letts et leur partage de réactions sur le net qui alimentent la polémique, on leur a dit qu'elle avait filmé son avortement alors qu'on ne voit rien d'autre que sa face, jolie mais sans intérêt. Et si, après tout, ce ne serait pas pour se déculpabiliser elle-même ?

mardi 6 mai 2014

Féminité ou féminisme ?

Trois ans ! Trois petites années que je n'ai rien écrit mais ce n'ai pas comme si j'avais arrêté de ruminer dans mon coin. J'ai continué à en voir des films et à critiquer des choses sans importance par-ci par-là. Pourtant j'en avais du temps : assignée à résidence par le chômage (après avoir fait la fac, aïe) et aussi par l'arrivée d'un nouveau membre dans la famille (et ce n'est pas un chat).

Je trouve ça quand même un peu injuste que ce soit la femme qui mette sa vie entre parenthèses. C'est vrai, il y en a qui reprennent rapidement le boulot et la vie de couple etc. Mais quand même ! Sa vie bascule car implicitement, de nouvelles tâches et responsabilités lui incombent désormais "naturellement". Il y en a aussi qui aiment tout cela. Quand j'étais en échange à l'étranger, un type, un autre français m'a dit une fois :
"quand je regarde les profils de mes anciennes connaissances du lycée sur copains d'avant, je vois qu'ils sont tous installés et qu'ils n'ont rien fait d'autre de leur vie après l'école que de pondre des gosses". C'est un peu sévère mais c'est aussi un peu vrai. Certaines personnes n'ont pas fait d'études, n'ont pas des jobs super (ou pas du tout comme moi) donc avoir un enfant (beau et en bonne santé) peut être une grande source de fierté. J'étais d'accord avec le type car pour moi c'était un peu dommage avoir un enfant avant 25 ans mais avec la naissance de mon petit j'ai compris. J'ai compris ce qu'était donner la vie, de "fabriquer" un être humain en n'étant pas certaine du résultat et ensuite de le gérer de A à Z comme une extension incontrôlable de soi-même. J'entends bien qu'il y ait des filles qui n'ont rien, ni talent ni "intelligence", et que de donner naissance à leur enfant puisse être la meilleure chose qu'elles aient faite. Et puis flûte, aimer son enfant c'est normal.

En France, je ne sais pas ce qu'il se passe avec la Famille. Les gens regardent cela de travers : les marmots c'est pénible et ça pue, pourquoi devoir laisser nos places aux gens avec enfants, on ne veut pas employer de femme parce qu'elles tombent enceintes, c'est nul d'être mère tu n'as plus de liberté ni de vie sociale etc etc. Et bien, comme je l'ai déjà dit, il y en a qui aiment. Pourquoi stigmatiser celles qui aiment la vie de famille et prendre soin de leur mari et enfant ? Les valeurs de la famille n'ont déjà pas la côte (c'est ringard, pas rentable ou pas valorisant) alors de ce qui pourrait aliéner la femme, n'en parlons pas...
Aperçoit une femme au foyer heureuse : "Eh, tu es opprimée! Retourne au bureau et sois libre!!"
Une autre fois, une amie, une jeune étudiante que j'avais rencontrée pendant un job m'a dit :
"je trouve ça débile les "féministes" qui rabaissent les autres filles parce qu'elle aiment s'occuper de leur mec ou de leur appartement, moi j'essaie des nouvelles recettes de gâteaux tous les dimanches et je les fait goûter à mon copain, et ça me fait plaisir". Cette amie met en évidence un élément important : les féministes s'avilissent elles-mêmes en se dictant des comportements. On se retrouve, pour caricaturer, avec des femmes disant aux femmes comment être femmes en étant moins "féminines". C'est à dire que les filles (de la petite à la grande) n'ont plus le droit d'aimer le rose, les princesses, la cuisine, de se dévouer, de vouloir être mignonnes ou élégantes et mystérieuses. Non, la petite fille doit être garçon manqué et la grande sexuelle, décomplexée, connasse...

Peut-être que les femmes doivent taper du poing très fort et arriver à de hautes exigences pour obtenir une égalité à la baisse. Les hommes se méprennent tout de même, ils croient que ce que nous demandons c'est d'être considérées comme des hommes exactement comme eux. Au fond, ce que, nous les femmes, on devrait demander c'est le respect. Et aussi il faut qu'on arrête d'agir en fonction des critères masculins, qu'on arrête de taper du poing  sans réfléchir, parce qu'en réalité, on laisse les hommes exiger des choses de nous et finalement il faudrait les faire admettre notre équivalence (égales
voudrait dire exactement pareils). Et Surtout, qu'on arrête de se rabaisser nous-mêmes entre femmes, de critiquer les choix de vie des autres et de culpabiliser celles qui ont sacrifié leur carrière par choix ou obligation.

vendredi 10 juin 2011

Le Chat du Rabbin, le film de Joann Sfar

Un dessin animé adapté de la bande dessinée de Joann Sfar ! Ce n'est donc pas que pour les enfants ! Même si l'auteur ne voulait pas en faire quelque chose d'intellectuel, je pense que le film porte en lui une double lecture et une réflexion morale sur les religions très profondes.

Synopsis :
Alger, années 1920. Le rabbin Sfar vit avec sa fille Zlabya, un perroquet bruyant et un chat espiègle qui dévore le perroquet et se met à parler pour ne dire que des mensonges. Le rabbin veut l’éloigner. Mais le chat, fou amoureux de sa petite maîtresse, est prêt à tout pour rester auprès d’elle... même à faire sa Bar-Mitsva !
Le rabbin devra enseigner à son chat les rudiments de la loi mosaïque !
Une lettre apprend au rabbin que pour garder son poste, il doit se soumettre à une dictée en français. Pour l’aider, son chat commet le sacrilège d’invoquer l’Eternel. Le rabbin réussit mais le c
hat ne parle plus. On le traite de nouveau comme un animal ordinaire.
Son seul ami sera bientôt un peintre russe en quête d’une Jérusalem ima
ginaire où vivraient des Juifs noirs. Il parvient à convaincre le rabbin, un ancien soldat du Tsar, un chanteur et le chat de faire avec lui la route coloniale...

Sans tomber dans les clichés d'amour et de tolérance entre les religions, je trouve que la relation entre le rabbin et le cheikh donne une bonne leçon de cohabitation entre les religions, même si au fond c'est aussi parce qu'ils sont de la même famille. D'ailleurs cela vaut aussi pour les 3 grandes religions : cathos, juifs et musulmans, c'est un peu la même chose au fond (n'est-ce-pas le même Dieu ?) comme le fait remarquer justement le rabbin au péril de sa vie.

Au fond, la religion idéale et le refuge paradisiaque n'existent pas lorsque les hommes pensent avoir raison quitte à utiliser la violence fanatique ou convertir de force (épisode des Touaregs) ou qu'ils décident d'exclure leurs semblables pour conserver leur idée de la religion (épisode des Juifs noirs ou rejet du juif russe). Comme le fait remarquer le Chat, un homme reste un homme, idiot ou pas.

D'ailleurs, le fait que la voix de la contestation soit celui d'un chat insolent passe mieux. Il ne peut se positionner en faveur de personne en n'étant pas humain même si ses maîtres son juifs (la religion ce n'est pas une affaire de chat), il est seulement à la recherche du bonheur simple d'être au près de sa jolie maitresse bien aimée.

Un petit bonus : le making of du Chat !



Les autres religions aussi en prennent pour leur grade, comme avec les musulmans à la lecture du Coran fanatique et erronée et cette sorte d'hédoniste qui fini mal. C'est un autre musulman sage qui le leur dit, mais comme c'est un artiste nomade il possède plus d'ouverture d'esprit que ces Touaregs vivant en retrait du monde. Au final, le paradis religieux et tolérant n'existe pas et on doit le créer soi-même.

En ce qui concerne l'esthétique du film, les dessins sont moins durs et moins sombres que ceux de la bande dessinée avec peut-être aussi la sensualité ou la dramatisation en moins. J'avoue que j'aime beaucoup ce que fait Sfar, de Gainsbourg vie Héroique en passant par Petit Vampire et ses dessins faussement brouillons.

jeudi 14 avril 2011

1981 rules in DMA !


La semaine dernière avait eu lieu le vernissage de Rennes 1981, une expo rétrospective sur la culture rennaise des années 1980, punk, rock et underground. L'exposition concerne également un revival musical avec une série de concerts (à guichets fermés !).

Dans la petite mais populaire galerie, on pouvait y voir se côtoyer des photos de l'époque ou actuelles (dont certaines du fameux Richard Dumas) ou des toiles de l'artiste rennais Poch (à l'origine du projet) accompagnés par d'autres plasticiens et photographes non-moins célèbres. Artistes surtout témoins d'une époque que la génération 1980s se remémore avec nostalgie.

(Artiste: Dany Delboy)

Le vernissage fut l'occasion de découvrir ou de redécouvrir la scène et l'ambiance rennaise des 1980s, ou encore de retrouvailles entre vieux amis, avec même le secret espoir de revoir ses premiers amours... J'ai même eu l'occasion d'entendre des anecdotes de premier plan d'une ancienne égérie de rockeur ! Il n'y aura plus d'occasion d'une telle jeunesse, pensais-je avec soupir. Et en vieille réac' que je suis, j'affirme que les jeunes d'aujourd'hui ne connaissent rien et peu de choses viendront marquer leur époque. Génération Gossip Girl ...

(Tableaux de T. Marinescu)

La génération 1980s est selon moi, la génération qui domine plusieurs époques culturelles dont celle de maintenant. Qu'on ait été ado ou qu'on soit nés dans les débuts des eighties, on exerce encore notre influence artistique ou musicale (du moins je l'espère) surtout que la jeunesse semble durer plus longtemps de nos jours. D'autant que plusieurs mythes sont nés dans les alentours de 1980s (le clip vidéo, les mythes musicaux, la jeunesse déglingos, les jeux vidéos, le rubik's cube, les enfants d'immigrés ...). La preuve est qu'on assiste au retour musical du rock made in 1980s tandis que M6 tente de faire revivre son Dance Machine ! Héritage des 1990s qui a vu naitre boys bands, tecno music et sitcoms français entre autres.

(Artiste : Poch)

Après un piètre retour au rock façons Beatles, garage ou même new wave (qui ont donné naissance au cucul Baby rock) on arrive à une ère où on s'en fout que l'artiste chante pour de vrai ou qu'il offre du déjà vu, du moment qu'il fasse parler de lui et qu'il s'exhibe assez. Triste à dire... mais en y réfléchissant, les trucs qui font succès maintenant sont juste le reflet des goûts des jeunes de l'époque actuelle.

dimanche 27 février 2011

Glissements chez DMA

Dans la veine du sujet concernant le film de Banksy, voici une petite actu culturelle qui se passe à Rennes jusqu'au 2 avril. Il s'agit surtout de l'artiste Mardi Noir qui travaille sur les murs et détourne aussi des éléments aux allures baroques ou insolites, le tout avec un détachement peut être moqueur mais aussi critique de l'environnement qui entoure ses œuvres .

Image piquée sur le site de DMA.

Banksy est d'ailleurs nommé aux oscars mais ne participera sûrement pas car il lui est interdit de venir déguisé afin de dissimuler son identité.

mardi 28 décembre 2010

Faites le Mur, un film de Banksy

Une grosse crève me clouant chez moi, je suppose que j'ai le temps pour mes élucubrations cinématiques d'autant plus qu'étant bénévole dans un cinéma j'ai la possibilité de voir beaucoup de films... Je me sens investie d'une mission d'utilité publique (*auto persuasion*) !

Le film de ce soir sera, vous l'aurez compris, celui de Banksy soi-disant sur le street artist Thierry Guetta aka Mr Brainwash. Pourquoi soi-disant ? Parce que le personnage excentrique de MBW est un peu gros. Pas par l'embonpoint mais par son "existence". Pour authentifier ce monsieur français qui a vécu son rêve américain à fond (revendre des vêtements vintages à 300% de leur prix aux bobos chics de L.A.) on nous montre des images d'archives familiales qui ne peuvent pas remettre en cause qu'il existe bel et bien, qu'il habite aux USA et qu'il est marié à une charmante femme (pas nommée Cathy heureusement).

Le film est présenté comme un documentaire sur ce personnage donc. De son intérêt à filmer, en passant par sa découverte des graffitis et finissant sur sa propre ascension dans le milieu appelé désormais "street art", avec comme élément déclencheur sa rencontre avec Banksy. Tout d'abord Thierry Guetta se contente de suivre les graffeurs comme leur ombre (leur tapant sur les nerfs souvent) durant leurs périples nocturnes ce qui lui permet de nouer des contacts au fil des rencontres, à commencer par son "cousin" le fameux Space Invader... Le film est truffé de détails gros comme des maisons qui décrédibilisent TG tout en mettant en valeur les autres artistes. Tiens d'ailleurs je trouve ça bien trouvé comme nom, Space Invader puisqu'il s'approprie les murs privés comme supports pour ses mosaïques, même jusque Rennes !

Je pense que le hoax, l'imposture, a eu lieu dans le secret et que le résultat est un film "foutage de gueule" pour la bonne cause. Le "documentaire" est fait de telle sorte qu'on y croie car il y a beaucoup d'éléments véridiques comme certaines images inédites sur les activités des artistes (par exemple la réserve de faux billets à l'effigie de Lady Di de Banksy ou la réalisation de la cabine téléphonique couchée) ou des aperçus très chouettes sur les "œuvres". Le moment où j'ai commencé à douter c'est justement l'histoire de la rencontre avec Banksy : un graffeur appelle TG tout d'un coup comme ça pour emmener Banksy sur les bons spots, ensuite TG lui offre un portable pour le joindre etc. Là où j'ai été convaincue c'est quand TG a eu son accident d'échelle alors qu'il préparait son expo. D'autres éléments sont plutôt humoristiques comme lorsque l'assistant se plaint, ou alors lorsque MBW négocie le prix exorbitant de ses toiles ou encore lorsque qu'il réalise des sérigraphies "uniques" au fauteuil roulant.


Le film documentaire moqueur est plus profond qu'il n'y parait et possède plusieurs niveaux d'interprétation. D'abord une réflexion sur la définition de l'Art, ici on ne parle pas du vulgaire graff' mais d'un moyen d'expression artistique avec une vraie démarche esthétique, pas de tags dégradant des murs urbains déjà laids. Mais est-ce que cela peut pour autant rivaliser avec Raphaël ou émouvoir les foules comme une œuvre majeure et universelle ? Justement, une autre question est soulevée, c'est celle des clients. Dans le film on montre ostentatoirement les Angelina Jolie et autres Jude Law en tant qu'amateurs "d'art underground" ou de riches s'encanaillant avec des "collections" Banksy. Alors, on achète pour faire cool ?

La question de l'authenticité est bien entendu omniprésente, avec TG et aussi au niveau des œuvres elles-mêmes d'ailleurs. Un pochoir ça se copie, un graffiti c'est anonyme, un style graphique ça s'imite, une photocopie ça se duplique... Banksy et un autre artiste, Shepard Fairey disent d'ailleurs de MBW qu'il s'est inspiré voire copié tous les styles graphiques rencontrés au cours des année et en a extrait le sens/l'essence. Alors démarche artistique ou nouveau Banksy cheap ? Ce que je trouve un peu euh, con c'est qu'au début du film Banksy (si c'est lui) nous dit "faire un film sur un mec plus intéressant que lui" alors qu'à la fin il le reconnait comme n'étant rien (ou alors un lointain héritier de Warhol). Formule détournée pour s'autovaloriser ? Tiens, d'ailleurs dans le film MBW n'effectue même pas lui-même les travaux. Lui, il a l'idée, c'est déjà pas mal... A moins que derrière MBW se cache vraiment un collectif ?

Le dernier aspect artistique questionné n'est pas nouveau mais prend encore plus de sens ici, il s'agit de la réflexion sur la célébrité rapide et l'étiquette "artiste" collée elle aussi rapidement depuis que l'Art est devenu moderne. Faire le plasticien dans la rue suffit-il pour se définir comme street artist ? Utiliser et détourner des graphismes déjà connus suffit-il pour se définir comme artiste controversé ?

Sinon du point de vue graphique et esthétique, j'ai quand même bien aimé le film. Pas par la façon dont c'était filmé (le côté caméra embarquée par TG me donne mal à la tête) mais plutôt par les aperçus graphiques. Le film, lui, énerve et certains conseillent même, à défaut de faire le mur, de faire l'impasse (Télérama)...

En tout cas, moi je découvre Banksy, même si je connaissais de loin son travail je n'avais pas de nom à mettre dessus. Je trouve son travail recherché et esthétique, et "rock"... J'ai une petite pensée émue pour l'artiste qui peint les ombres des lampadaires ou des bancs publics, c'est... c'est ... poétique d'un instant "T".

Image du milieu prise dans le supplément gratuit Beaux Arts.

Ah oui ! Et bonne année 2011 !